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Simenon, Georges - Un crime en Hollande

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Название:
Un crime en Hollande
Автор
Издательство:
неизвестно
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Год:
неизвестен
Дата добавления:
16 октябрь 2019
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343
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Simenon, Georges - Un crime en Hollande

Simenon, Georges - Un crime en Hollande краткое содержание

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Quand Maigret arriva à Delfzijl, une après-midi de mai, il n'avait sur l'affaire qui l'appelait dans cette petite ville plantée à l'extrême nord de la Hollande que des notions élémentaires. Un certain Jean Duclos, professeur à l'université de Nancy, faisait une tournée de conférences dans les pays du Nord. A Delfzijl, il était l'hôte d'un professeur à l'Ecole navale, M. Popinga. Or, M. Popinga était assassiné et, si l'on n'accusait pas formellement le professeur français, on le priait néanmoins de ne pas quitter la ville et de se tenir à la disposition des autorités néerlandaises. C'était tout, ou à peu près. Jean Duclos avait alerté l'université de Nancy, qui avait obtenu qu'un membre de la Police Judiciaire fût envoyé en mission à Delfzijl. La tâche incombait à Maigret. Tâche plus officieuse qu'officielle et qu'il avait rendue moins officielle encore en omettant d'avertir ses collègues hollandais de son arrivée. Par les soins de Jean Duclos, il avait reçu un rapport assez confus, suivi d'une liste des noms de ceux qui étaient mêlés de près ou de loin à cette histoire. Ce fut cette liste qu'il consulta un peu avant d'arriver en gare de Delfzijl.

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Un crime en Hollande - читать книгу онлайн бесплатно, автор Simenon
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» Puis c’est Beetje qui est écartée, Beetje qui, au cours de la soirée, n’est pas allée au premier étage, n’a pu y déposer la casquette et n’a même pas pu la voler à bord, puisqu’elle marchait côte à côte avec Popinga…

» Son père aurait pu tuer, après l’avoir surprise avec son amant… Mais, à cet instant, il était trop tard pour monter dans la salle de bains…

» Reste Barens… Il n’est pas allé là-haut davantage… Il n’a pas volé la casquette… Il était jaloux de son professeur, mais, une heure plus tôt, il n’avait encore aucune certitude…

Maigret se tut, vida sa pipe en la frappant contre son talon, sans souci du tapis.

— C’est à peu près tout. Il nous reste le choix entre Mme Popinga, Any et Jean Duclos. Aucune preuve contre l’un des trois. Mais aucune impossibilité matérielle non plus. Jean Duclos est sorti de la salle de bains avec le revolver à la main. On peut prendre cela comme un gage de son innocence. Mais cela peut être aussi une suprême habileté… Pourtant, comme il marchait, en revenant de la ville, avec Mme Popinga, il n’a pas pu voler la casquette… Et Mme Popinga, qui était avec lui, n’a pas pu le faire davantage…

» La casquette ne pouvait être volée que par le dernier groupe : Barens ou Any… Et tout à l’heure il a été démontré qu’Any était restée seule un moment en face du bateau d’Oosting…

» Je ne parle pas du cigare… Il suffit de se baisser, n’importe où, pour cueillir un vieux mégot…

» De tous ceux qui étaient ici le soir du crime, Any est la seule à être restée là-haut sans témoin, à avoir pénétré en outre dans la salle à manger…

» Mais elle avait, quant au crime, le meilleur des alibis…

Et Maigret, le regard toujours fuyant, évitant de fixer ses interlocuteurs, mit sur la table le plan des lieux dressé par Duclos.

— Any ne peut gagner la salle de bains qu’en passant par la chambre de sa sœur ou par celle du Français. Un quart d’heure avant le meurtre, elle est chez elle… Comment ira-t-elle dans la salle de bains ?… Comment a-t-elle la certitude de passer, le moment venu, par une des deux chambres ?… N’oubliez pas qu’elle a étudié, non seulement le droit, mais les ouvrages de police scientifique… Elle en a discuté avec Duclos. Ils ont parlé ensemble de la possibilité du crime mathématiquement impuni…

Any, toute droite, était exsangue, gardait pourtant son sang-froid.

— Il faut que je fasse une parenthèse. Je suis le seul ici à n’avoir pas connu Popinga. J’ai dû me faire une idée de lui d’après des témoignages… Il avait soif de jouissances autant qu’il était timide devant les responsabilités et surtout devant les principes établis… Il a caressé Beetje, un jour de gaieté… Et elle est devenue sa maîtresse… Surtout parce qu’elle l’a voulu !… J’ai interrogé la domestique, tout à l’heure… Il l’a caressée aussi, comme ça, en passant… Mais il n’a pas été plus loin parce qu’il n’y a pas été particulièrement encouragé…

» Autrement dit, il a envie de toutes les femmes… Il commet de petites imprudences… Il vole un baiser, une caresse… Mais il tient avant tout à sa sécurité…

» Il a été capitaine au long cours… Il a connu le charme des escales sans lendemain… Mais il est fonctionnaire de Sa Majesté et il tient à sa place comme il tient à sa maison, à son foyer, à sa femme…

» C’est un compromis d’appétits et de refoulements, de folie et de sagesse !…

» A dix-huit ans, Beetje ne l’a pas compris et a cru qu’il s’enfuirait avec elle…

» Any vit dans son intimité… Qu’importe qu’elle ne soit pas jolie ?… C’est une femme… C’est le mystère… Un jour…

Le silence, autour de lui, était pénible.

— Je ne prétends pas qu’il soit son amant… Mais, avec elle aussi, il a été imprudent… Elle l’a cru… Elle s’est prise de passion pour lui… D’une passion moins aveugle que celle de Mme Popinga…

» Ils ont vécu ainsi tous trois… Mme Popinga confiante… Any plus renfermée, plus passionnée, plus jalouse, plus subtile…

» Elle a deviné, elle, ses relations avec Beetje… Elle a senti l’ennemie… Peut-être a-t-elle cherché, a-t-elle trouvé les lettres…

» Elle acceptait le partage avec sa sœur… Elle ne pouvait accepter cette belle fille saine et jeune avec qui il était question de fuir…

» Elle a décidé de tuer…

Et Maigret de conclure :

— C’est tout ! Un amour qui se mue en haine ! Un amour-haine ! Un sentiment complexe, farouche, capable de tout inspirer… Elle a décidé de tuer… Elle l’a décidé froidement. De tuer sans donner prise à la moindre accusation !…

» Et le professeur, ce soir-là, a parlé des crimes impunis, des assassins scientifiques…

» Elle est aussi fière de son intelligence que passionnée… Elle a commis le beau crime… Un crime qui devait fatalement être mis sur le compte d’un rôdeur…

» La casquette… Le cigare… Et l’alibi irréfutable : elle ne pouvait sortir de sa chambre pour tuer sans passer par la chambre de sa sœur ou par celle du Français…

» Pendant la conférence, elle a vu des mains qui se cherchaient… En chemin, Popinga a marché avec Beetje… Ils ont bu et ils ont dansé… Ils sont partis ensemble, en vélo…

» Il ne restait qu’à immobiliser Mme Popinga à sa fenêtre, qu’à insinuer le soupçon en elle…

» Et tandis qu’on la croyait dans sa chambre, elle a pu passer, déjà en combinaison, derrière son dos… Tout a été prévu… Elle a gagné la salle de bains… Elle a tiré… Le couvercle de la baignoire était ouvert… La casquette s’y trouvait… Elle n’avait qu’à s’y glisser…

» Après le coup de feu, Duclos est entré, a trouvé l’arme sur l’appui de fenêtre, est sorti précipitamment et, rencontrant Mme Popinga sur le palier, est descendu avec elle…

» Any, déjà prête, déjà à demi dévêtue, les a suivis… Qui pouvait soupçonner qu’elle ne sortait pas de sa chambre, qu’elle n’était pas affolée, elle dont la pruderie était légendaire et qui se montrait dans cette tenue ?…

» Pas de pitié ! Pas de remords ! Ces haines amoureuses éteignent tous les autres sentiments. La volonté de vaincre, seulement !…

» Oosting, qui avait vu voler la casquette, s’est tu… A la fois son respect pour le mort et son amour de l’ordre !… Il ne fallait pas de scandale autour du décès de Popinga… Il a même dicté à Barens une déposition laissant croire à un crime crapuleux commis par un matelot inconnu…

» Liewens, qui a vu sa fille revenir vers la maison après que Popinga l’eut reconduite et qui, le lendemain, a lu les lettres, a cru à la culpabilité de Beetje, l’a enfermée, s’est obstiné à découvrir la vérité…

» Supposant que j’allais l’arrêter, tout à l’heure, il a essayé de se tuer…

» Et Barens enfin… Barens soupçonnant tout le monde, se débattant contre le mystère et se sentant soupçonné lui-même…

» Barens qui avait vu Mme Popinga à sa fenêtre… N’était-ce pas elle qui avait tiré après avoir découvert qu’elle était trompée ?…

» Il a été reçu ici comme un enfant de la maison… Orphelin, il a trouvé en elle une nouvelle maman…

» Il a voulu se dévouer… Il a voulu la sauver… On l’avait oublié dans la distribution des rôles… Il est allé chercher le revolver… Il a gagné la salle de bains. Il a voulu tirer… Tuer le seul homme qui savait, et sans doute se tuer ensuite !…

» Un pauvre gosse héroïque… De la générosité comme on n’en a qu’à dix-huit ans !…

» C’est tout !… A quelle heure y a-t-il un train pour la France ?…


Pas un mot. Des gens raidis par la stupeur, par l’angoisse, par la peur ou par l’horreur. Enfin Jean Duclos prononça :

— Vous voilà bien avancé…

Cependant Mme Popinga sortait, d’une démarche d’automate, et quelques instants plus tard on la trouvait étendue sur son lit, en proie à une crise cardiaque.

Any n’avait pas bougé. Pijpekamp tenta de la faire parler :

— Vous avez quelque chose à répondre ?

— Je parlerai en présence du juge d’instruction.

Elle était toute pâle. Le cerne de ses yeux mangeait la moitié des joues.

Il n’y avait qu’Oosting à être calme, mais à regarder Maigret avec des yeux pleins de reproche.

Et le fait est qu’à cinq heures cinq du matin le commissaire, tout seul, prenait le train à la petite gare de Delfzijl. Personne ne l’avait accompagné. Personne ne l’avait remercié. Jusqu’à Duclos qui avait prétendu qu’il ne pouvait prendre que le train suivant !

Le jour se leva comme le train traversait un pont, sur un canal. Des bateaux attendaient, voiles molles. Un fonctionnaire était prêt à faire pivoter le pont dès le passage du convoi.

Ce ne fut que deux ans plus tard que le commissaire rencontra à Paris Beetje, qui était devenue la femme d’un dépositaire de lampes électriques hollandaises et qui avait engraissé. Elle rougit en le reconnaissant.

Elle lui annonça qu’elle avait deux enfants, mais lui laissa entendre que son mari lui faisait une vie médiocre.

— Any ?… lui demanda-t-il.

— Vous ne savez pas ?… Tous les journaux de Hollande en ont parlé… Elle s’est tuée, avec une fourchette, le jour du procès, quelques minutes avant de paraître devant le tribunal…

Et elle ajouta :

— Vous viendrez nous voir… Avenue Victor-Hugo, au 28… Ne tardez pas trop, car nous partons la semaine prochaine aux sports d’hiver, en Suisse…

Ce jour-là, à la Police judiciaire, il trouva le moyen d’engueuler tous ses inspecteurs.


Morsang, à bord de l’« Ostrogoth », mai 1931


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