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Simenon, Georges - Un crime en Hollande

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Название:
Un crime en Hollande
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неизвестно
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неизвестен
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16 октябрь 2019
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Simenon, Georges - Un crime en Hollande

Simenon, Georges - Un crime en Hollande краткое содержание

Simenon, Georges - Un crime en Hollande - описание и краткое содержание, автор Simenon, читайте бесплатно онлайн на сайте электронной библиотеки My-Library.Info

Quand Maigret arriva à Delfzijl, une après-midi de mai, il n'avait sur l'affaire qui l'appelait dans cette petite ville plantée à l'extrême nord de la Hollande que des notions élémentaires. Un certain Jean Duclos, professeur à l'université de Nancy, faisait une tournée de conférences dans les pays du Nord. A Delfzijl, il était l'hôte d'un professeur à l'Ecole navale, M. Popinga. Or, M. Popinga était assassiné et, si l'on n'accusait pas formellement le professeur français, on le priait néanmoins de ne pas quitter la ville et de se tenir à la disposition des autorités néerlandaises. C'était tout, ou à peu près. Jean Duclos avait alerté l'université de Nancy, qui avait obtenu qu'un membre de la Police Judiciaire fût envoyé en mission à Delfzijl. La tâche incombait à Maigret. Tâche plus officieuse qu'officielle et qu'il avait rendue moins officielle encore en omettant d'avertir ses collègues hollandais de son arrivée. Par les soins de Jean Duclos, il avait reçu un rapport assez confus, suivi d'une liste des noms de ceux qui étaient mêlés de près ou de loin à cette histoire. Ce fut cette liste qu'il consulta un peu avant d'arriver en gare de Delfzijl.

Un crime en Hollande читать онлайн бесплатно

Un crime en Hollande - читать книгу онлайн бесплатно, автор Simenon

— On a téléphoné à la gendarmerie, au médecin… On a appelé Wienands, qui est venu nous aider… Je sentais une certaine gêne… J’oubliais qu’on m’avait vu avec le revolver dans la main… Les gendarmes me l’ont rappelé, m’ont demandé des explications… Ils m’ont prié poliment de me tenir à leur disposition…

— Il y a six jours de cela ?

— Oui… Je travaille à résoudre le problème, car c’en est un !… Voyez ces papiers.

Maigret vida sa pipe, sans un regard aux papiers en question.

— Vous ne sortez pas de l’hôtel ?

— Je le pourrais, mais je préfère éviter tout incident. Popinga était très aimé de ses élèves, qu’on rencontre sans cesse par la ville…

— On n’a découvert aucun indice matériel ?

— Pardon ! Any, qui poursuit son enquête de son côté et qui espère bien réussir, encore qu’elle manque de méthode, m’apporte de temps à autre des renseignements… Sachez d’abord que la baignoire de la salle de bains est recouverte d’un couvercle en bois qui la transforme en table à repasser… Le lendemain matin, on a soulevé ce couvercle et l’on a trouvé une vieille casquette de marin qui n’avait jamais été vue dans la maison… Au rez-de-chaussée, les investigations ont eu pour résultat de faire découvrir, sur le tapis de la salle à manger, un bout de cigare en tabac très noir, de Manille, je crois, comme n’en fumaient ni Popinga, ni Wienands, ni le jeune élève. Et moi, je ne fume jamais… Or, la salle à manger avait été balayée aussitôt après le dîner…

— D’où vous concluez ?…

— Rien ! laissa tomber Jean Duclos. Je conclurai à mon heure. Je m’excuse de vous avoir fait venir de si loin. Au surplus, on aurait pu choisir un policier connaissant la langue du pays… Vous ne me serez utile qu’au cas où l’on prendrait à mon égard des mesures contre lesquelles vous auriez à protester officiellement.

Maigret se caressait le nez tout en souriant d’un sourire vraiment délicieux.

— Vous êtes marié, monsieur Duclos ?

— Non !

— Et vous ne connaissiez auparavant ni les Popinga, ni la petite Any, ni aucune des personnes présentes ?

— Aucune ! Eux me connaissaient de réputation…

— Bien entendu ! Bien entendu !…

Et il prit sur la table les deux plans faits au tire-ligne, les fourra dans sa poche, toucha le bord de son chapeau et s’en fut.


Le bureau de police était moderne, confortable et clair. On attendait Maigret. Le chef de gare avait signalé son arrivée et l’on s’étonnait de ne pas encore l’avoir vu.

Il entra comme chez lui, retira son pardessus de demi-saison, posa son chapeau sur un meuble.

L’inspecteur envoyé de Groningen parlait un français lent, un peu précieux. C’était un grand garçon blond et sec, d’une affabilité remarquable, qui soulignait toutes ses phrases de petits saluts semblant dire : « Vous comprenez ?… Nous sommes d’accord ?… »

Il est vrai que Maigret ne le laissa guère parler.

— Puisque vous êtes sur cette affaire depuis six jours, dit-il, vous devez avoir vérifié les heures…

— Quelles heures ?…

— Il serait intéressant de savoir, par exemple, combien de minutes exactement la victime a mises pour reconduire Mlle Beetje chez elle et revenir… Attendez !… Je voudrais savoir aussi à quelle heure Mlle Beetje a mis les pieds à la ferme où son père, qui l’attendait, doit pouvoir vous répondre… Enfin à quelle heure le jeune Cor est rentré au bateau-école, où il y a sans doute un homme de garde…

Le policier eut l’air ennuyé, se leva soudain, comme pris d’une inspiration, marcha vers le fond de la pièce et revint avec une casquette de marin complètement avachie. Alors il prononça avec une lenteur exagérée :

— Nous avons retrouvé le propriétaire de cet objet, qui a été découvert dans la baignoire… C’est… c’est un homme que nous appelons le Baes… En français, vous diriez le patron…

Est-ce que seulement Maigret écoutait ?

— Nous ne l’avons pas arrêté, parce que nous voulons le surveiller et que c’est une figure populaire du pays… Vous connaissez l’embouchure de l’Ems ?… Lorsqu’on arrive en mer du Nord, à une dizaine de milles d’ici, on rencontre des îles sablonneuses, que les grandes marées d’équinoxe submergent à peu près complètement… Une de ces îles s’appelle Workum… Un homme s’y est installé, avec sa famille, des valets, et s’est mis en tête d’y faire de l’élevage… C’est le Baes… Il a obtenu une subvention de l’Etat, car il y a un feu fixe à entretenir… On l’a même nommé maire de Workum, dont il est le seul habitant… Il a un bateau à moteur, avec lequel il va et vient de son île à Delfzijl…

Maigret ne bronchait toujours pas. Le policier cligna de l’œil.

— Un drôle de corps ! Un bonhomme de soixante ans, dur comme une roche. Il a trois fils, qui sont des pirates comme lui… Car… Ecoutez !… Ce ne sont pas des choses à raconter. Vous savez que Delfzijl reçoit surtout des bois de Finlande et de Riga… Les vapeurs qui les amènent ont une partie du chargement sur le pont… Ce chargement est retenu par des chaînes… Or, en cas de danger, les capitaines ont ordre de faire couper les chaînes et de laisser emporter le chargement de pont par la mer, afin d’éviter la perte du bateau tout entier… Vous ne comprenez pas encore ?…

Décidément, Maigret n’avait pas l’air de s’intéresser du tout à cette histoire.

— Le Baes est un malin… Il connaît tous les capitaines qui viennent ici… Il sait s’arranger avec eux… Alors, en vue des îles, il y a toujours une raison pour couper au moins une des chaînes… Ce sont quelques tonnes de bois qui vont à la mer et que la marée transporte sur le sable de Workum… Droit d’épave !… Comprenez-vous, maintenant ?… Le Baes partage avec les capitaines… Et c’est sa casquette qu’on a retrouvée dans la baignoire !… Un seul ennui : il ne fume que la pipe… Mais il n’était pas nécessairement seul…

— C’est tout ?

— Pardon ! M. Popinga, qui a des relations partout, ou plutôt qui en avait, avait été nommé voilà quinze jours vice-consul de Finlande à Delfzijl…

Le maigre jeune homme blond triomphait, haletait de contentement.

— Où était son bateau la nuit du crime ?

Ce fut presque un cri :

— A Delfzijl !… A quai !… Près de l’écluse !… Autrement dit, à cinq cents mètres de la maison…

Maigret bourrait sa pipe, allait et venait dans le bureau, regardait d’un œil terne des rapports dont il ne comprenait pas un traître mot.

— Vous n’avez rien découvert d’autre ?… questionna-t-il soudain en enfonçant les deux mains dans ses poches.

Il fut à peine surpris de voir rougir le policier.

— Vous savez déjà ?…

Il se reprit :

— Il est vrai que vous avez passé toute l’après-midi à Delfzijl… Méthode française !…

Il parlait avec gêne.

— Je ne sais pas encore ce que vaut cette déposition… C’était le quatrième jour… Mme Popinga est venue… Elle m’a dit qu’elle avait consulté le pasteur pour savoir si elle devait parler… Vous connaissez la maison ?… Pas encore ?… Je puis vous remettre un plan…

— Merci ! J’en ai un ! dit le commissaire en le tirant de sa poche.

Et l’autre, ahuri, de poursuivre :

— Vous voyez la chambre des Popinga ?… De la fenêtre, on ne peut apercevoir qu’un morceau de la route qui conduit à la ferme… Juste le morceau qui est éclairé par les rayons du phare, de quinze en quinze secondes…

— Et Mme Popinga, jalouse, guettait son mari ?

— Elle regardait… Elle a vu passer les deux vélos qui allaient vers la ferme… Puis, tout de suite après, à cent mètres derrière, le vélo de Beetje Liewens…

— Autrement dit, après que Conrad Popinga l’eut reconduite, Beetje revenait toute seule vers la maison Popinga… Qu’en dit-elle ?…

— Qui ?

— La jeune fille…

— Encore rien… Je n’ai pas voulu la questionner tout de suite… C’est très grave… Et vous avez peut-être dit le mot… Jalousie !… Vous comprenez ?… M. Liewens est membre du Conseil…

— A quelle heure Cor est-il rentré à l’école ?

— Cela, nous savons… Cinq minutes après minuit…

— Et le coup de feu a été tiré ?…

— Cinq minutes avant minuit… Seulement, il y a la casquette, et le cigare…

— Il a un vélo ?

— Oui… Tout le monde, ici, circule en vélo… C’est pratique… Moi-même… Mais, ce soir-là, il ne l’avait pas pris.

— Le revolver a été examiné ?

— Ya ! C’est le revolver de Conrad Popinga… Revolver d’ordonnance… Il restait toujours chargé de six balles, dans la table de nuit…

— Le coup a été tiré à combien de mètres ?

— Environ six… (il prononçaitsis se). C’est la distance de la fenêtre de la salle de bains… C’est aussi la distance de la fenêtre de la chambre de M. Duclos… Et peut-être que le coup n’a pas été tiré d’en haut… On ne peut pas savoir, parce que le professeur, qui remisait son vélo, était peut-être penché… Seulement, il y a la casquette… Et le cigare, n’oubliez pas !…

— Zut pour le cigare ! grommela Maigret entre ses dents.

Et, à voix haute :

— Mlle Any est au courant de la déposition de sa sœur ?

— Oui.

— Qu’est-ce qu’elle en dit ?

— Elle ne dit rien ! C’est une jeune fille très instruite. Elle ne parle pas beaucoup. Elle n’est pas comme les autres jeunes filles…

— Elle est laide ?

Décidément, chaque interruption de Maigret avait le don de faire sursauter le Hollandais.

— Pas jolie !

— Bon ! donc elle est laide ! Et vous disiez que ?…

— Elle veut trouver l’assassin… Elle travaille… Elle a demandé à lire les rapports…

Ce fut un hasard. Une jeune fille entrait, une serviette de cuir sous le bras, vêtue avec une austérité qui frisait le manque de goût.

Elle marcha droit devant elle vers le policier de Groningen. Elle se mit à parler avec volubilité dans sa langue, sans voir l’étranger, ou bien le dédaignant.

L’autre rougit, se balança d’une jambe à l’autre, remua des papiers pour se donner contenance, désigna Maigret du regard. Mais elle ne consentait pas à faire attention à celui-ci.

En désespoir de cause, le Hollandais prononça en français, comme à regret :

— Elle dit que la loi s’oppose à ce que vous procédiez à des interrogatoires sur notre territoire…

— C’est Mlle Any ?

Un visage irrégulier. Une bouche trop grande, aux dents mal plantées, sans lesquelles elle n’eût pas été plus déplaisante qu’une autre. Une poitrine plate. De grands pieds. Mais surtout une assurance crispante de suffragette.

— Oui… Selon les textes, elle a raison… Mais je lui réponds que les usages…

— Mlle Any comprend le français, n’est-ce pas ?

— Je crois…

La jeune fille ne tressaillit même pas, attendit, le menton levé, la fin de cette conférence à deux qui ne semblait pas la concerner.

— Mademoiselle, dit Maigret avec une galanterie exagérée, j’ai l’honneur de vous présenter mes hommages… Commissaire Maigret, de la Police judiciaire… Tout ce que je voudrais savoir, c’est ce que vous pensez de Mlle Beetje et de ses relations avec Cornélius…

Elle essaya de sourire. Un sourire de timide qui se force. Elle regarda Maigret, puis son compatriote, balbutia dans un français pénible :

— Je ne… je… comprendre pas bien…

Et cet effort suffit à la rendre pourpre jusqu’aux oreilles, tandis que son regard appelait au secours.


III


Le Club des rats de quai

Ils étaient une dizaine d’hommes, en lourde vareuse de laine bleue, en casquette de marin et en sabots vernis, les uns adossés à la porte de la ville, d’autres appuyés à des bittes d’amarrage, d’autres enfin campés sur leurs jambes que de larges pantalons rendaient monumentales.

Ils fumaient, chiquaient, crachaient surtout, et de temps en temps une phrase les faisait rire aux éclats en se tapant les cuisses.

A quelques mètres d’eux, les bateaux. Derrière, la petite ville confite dans ses digues. Un peu plus loin, une grue déchargeait un bateau de charbon.

Tout d’abord, les hommes du groupe n’aperçurent pas Maigret qui flânait le long du warf. Si bien que le commissaire eut tout le temps de les observer.

Il savait qu’à Delfzijl on appelle ironiquement cette réunion le Club des rats de quai. Sans même en être informé, il eût deviné que la plupart de ces marins-là passaient le plus clair de leurs journées à la même place, sous la pluie ou le soleil, à bavarder paresseusement et à étoiler le sol de jets de salive.

L’un d’eux était propriétaire de trois clippers, de beaux bateaux à voiles et à moteur de quatre cents tonnes, dont un était en train de remonter l’Ems et ne tarderait pas à entrer au port.

Il y avait des gens moins reluisants, un calfat qui ne devait pas calfater grand-chose, et aussi le préposé à une écluse désaffectée, portant la casquette du gouvernement.

Mais, au milieu, un bonhomme éclipsait tous les autres, non seulement parce qu’il était le plus gros, le plus large, le plus rouge de visage, mais parce qu’on sentait en lui une personnalité plus forte.

Des sabots. Une vareuse. Sur la tête, une casquette toute neuve qui n’avait pas encore eu le temps de prendre la forme de la tête et qui par le fait était ridicule.

L’homme était Oosting, plus souvent appelé le Baes, occupé à fumer une courte pipe en terre tout en écoutant ce que ses voisins racontaient.

Il souriait vaguement. De temps en temps, il tirait sa pipe de sa bouche pour laisser la fumée s’échapper plus doucement de ses lèvres.

Un petit pachyderme. Une brute épaisse, avec pourtant des yeux très doux, et quelque chose d’à la fois dur et douillet dans toute sa personne.

Ses yeux étaient braqués sur un bateau d’une quinzaine de mètres amarré au quai. Un bateau rapide, bien coupé, un ancien yacht vraisemblablement, mais sale, en désordre.

C’était le sien et, de cette place-là, on pouvait voir ensuite l’Ems large de vingt kilomètres, un miroitement lointain qui était celui de la mer du Nord avec, quelque part, une bande de sable roux qui était l’île de Workum, le domaine d’Oosting.

Le soir tombait et les feux rouges du couchant rendaient plus rouge cette ville de brique, incendiaient le minium d’un cargo en réparation dont les reflets s’étiraient sur l’eau du bassin.

Le regard de Baes, en errant doucement sur les choses, alla en quelque sorte cueillir Maigret dans le paysage. Les prunelles, d’un bleu vert, étaient toutes petites. Elles restèrent accrochées au commissaire un bon moment, après quoi l’homme débourra sa pipe en la secouant contre son sabot, cracha, chercha dans sa poche une vessie de porc qui contenait le tabac et s’adossa plus confortablement au mur.


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